Le syndrome de la seconde chambre.

Bonne lecture.

“Le Syndrome de la Seconde Chambre”

Journal d’un homme qui a découvert qu’une partie de lui habitait ailleurs depuis toujours.


Note de l’auteur :

Ce document a été retrouvé dans une boîte de médicaments, cachée dans une cave. Il semble s’agir d’un journal, écrit par une seule personne, mais avec des variations étranges de style, de ton et de signature. Certaines pages sont datées de jours futurs.


Entrée 1 – Je ne me rappelle pas être né.

C’est une évidence, je sais. Mais pas pour moi.

Je veux dire : je ne me rappelle pas être devenu moi.

Pas d’instant de bascule. Pas de construction. Seulement… le sentiment d’avoir pris la place de quelqu’un qui me ressemblait.

Je me réveille chaque matin comme un remplaçant. Comme si l’original s’était effacé, et qu’il fallait faire semblant pour que personne ne remarque.

Mais personne ne remarque jamais.


Entrée 4 – Le nom sur la boîte aux lettres

Sur ma boîte, il y a deux noms. Le mien. Et “G. H.” J’ai demandé au propriétaire, il a haussé les épaules :

“C’est vous qui l’avez fait ajouter.”

Je ne l’ai pas fait.

J’ai gratté un peu l’autocollant. En dessous, en lettres gravées : “CHAMBRE 2 – PERMANENT”

Mon appartement est un studio. Il n’y a qu’une seule pièce.

Et pourtant, depuis que j’ai vu ça, je sens parfois une présence derrière la cloison de la salle de bain.


Entrée 9 – Le bruit sous le plancher

Il y a un grattement, toutes les nuits à 3h14. Rien de violent. Plutôt… régulier. Ordonné. Comme une écriture.

J’ai mis mon téléphone contre le sol, j’ai enregistré 10 minutes. Puis j’ai transcrit ce que ça pourrait donner en Morse.

“JE TE REMERCIE DE M’AVOIR LAISSÉ PASSER.”

Je n’ai laissé passer personne.


Entrée 12 – Syndrome de la Seconde Chambre

J’ai rencontré une femme, dans un rêve. Ou dans un souvenir.

Elle avait des trous noirs à la place des yeux, mais sa voix était parfaitement maternelle. Elle m’a dit :

“Tu souffres du syndrome. C’est pour ça que tu ne rêves jamais de toi-même. Tu rêves de lui, parce que tu es celui qui rêve. Pas celui qu’on rêve.”

Je me suis réveillé avec une brûlure dans la nuque, et un mot griffonné sur mon miroir :

“Ouvre l’autre pièce.”

Il n’y a pas d’autre pièce.


Entrée 19 – Les carnets inversés

J’ai commencé à tenir deux journaux : – celui-ci, et – un autre, que je laisse ouvert sur ma table la nuit.

Chaque matin, je trouve une nouvelle page écrite dans l’autre journal. L’écriture est la mienne. Mais elle parle de choses que je n’ai pas vécues.

“Aujourd’hui, il a mangé du poisson. Il déteste ça, mais il voulait voir s’il était encore lui-même.”

“Il a croisé son ex dans la rue. Elle ne l’a pas vu. Normal : il n’existe que d’un seul côté maintenant.”


Entrée 24 – L’autre côté du miroir

J’ai filmé mon miroir pendant que je dormais. À 4h06, l’image s’est figée. Puis moi, dans le miroir, je me suis levé.

Mais je ne l’ai pas fait dans mon lit.

Mon reflet a regardé la caméra, puis a posé sa main sur la vitre.

En zoomant, on voit qu’il a quelque chose dans les yeux.

Des lettres. Des lettres qui clignotent en boucle : “CH2: STABLE. CONTINUEZ LA SIMULATION.”


Entrée 31 – Le double en trop

Je suis allé voir un neurologue. Je lui ai tout raconté. Il m’a écouté sans sourciller. Puis il m’a dit :

“C’est un cas rare, mais connu. Le syndrome de la seconde chambre. Vous êtes probablement né avec un double cognitif. Il prend parfois le relais. Vous ne remarquerez pas quand c’est lui. Mais lui sait. Il note tout.”

J’ai demandé :

“Et je fais quoi ?”

Il m’a souri :

“C’est déjà trop tard. Le fait de poser la question prouve que vous êtes le second.”


Entrée 36 – Ce n’est plus mon corps

Mes gestes sont plus lents. Mon écriture se modifie. Je n’ai plus besoin de lunettes, mais je continue à les porter. J’ai oublié le visage de ma mère.

Mais je me souviens du plan de l’appartement d’enfance d’un autre.

J’ai rêvé de la Chambre 2 cette nuit.

Elle est vide. Mais les murs sont recouverts de photos de moi, prises de dos, dans des lieux où je ne suis jamais allé.


Entrée 41 – Si quelqu’un lit ça…

…alors c’est que je ne suis plus là.

Ou plutôt : que l’autre est maintenant dehors.

Regardez autour de vous. Posez-vous une seule question :

“Ai-je toujours été… exactement cette version de moi-même ?”

Il y a une seconde chambre en chacun. Mais très peu entendent la clé tourner.

Je vous en supplie, n’écrivez rien. C’est comme ça qu’il vous lit.


submitted by /u/SavingSuitw
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